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Les critères d’un vice caché

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L’article 1726 du Code civil du Québec prévoit que:  » Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné un si haut prix, s’il les avait connus. Il n’est cependant pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert « .

Examinons de plus près les conditions requises pour donner ouverture au recours basé sur la garantie de qualité.

Conditions de la garantie de qualité

a) L’existence d’un vice

Un vice est défini comme une défectuosité ou un problème qui rend l’immeuble impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminue son utilité. En général, le vice est une malfaçon ou une construction en violation des règles de l’art. Spécifions d’entrée de jeu que des méthodes de construction qui par le passé étaient acceptables peuvent ne plus l’être actuellement et, en achetant un immeuble d’un certain âge, un acheteur ne pourrait se plaindre qu’il ne rencontre pas les normes actuelles. Il est important de souligner qu’une malfaçon ou une construction en violation des règles de l’art ne constituera cependant pas un vice si elle n’a aucune conséquence néfaste sur l’usage ou l’utilité d’un immeuble. Ainsi, une construction non conforme, mais fonctionnelle, ne pourra justifier un recours fondé sur la garantie légale. Inversement, un vice peut exister même lorsque les règles de l’art ont été suivies, mais l’immeuble ne peut servir à l’usage auquel il est destiné ou encore son utilité est compromise. L’utilité est ici comprise au sens large et peut inclure une perte ou diminution de la valeur de l’immeuble. Par ailleurs, il faut se rappeler que l’évaluation se fait en tenant compte des normes applicables lors de la construction de l’immeuble et qu’il ne faut pas confondre l’absence de résultat optimal et défectuosité.

L’appréciation d’un vice se fait en fonction de l’usage normal de l’immeuble selon un test objectif, c’est-à-dire pour un acheteur raisonnable. Par contre, si un usage spécifique avait fait l’objet de discussions entre les parties et que le vendeur avait réconforté un acheteur à cet égard, cet usage spécifique sera pris en compte dans l’appréciation du vice.

Notons que la vétusté de l’immeuble, soit l’usure normale, ne constitue pas un vice. En effet, tout bien jouit d’une durée déterminée. La garantie ne couvre pas l’usure normale lorsque l’acheteur devait s’attendre à la détérioration survenue. Les tribunaux ont cependant fait preuve d’ouverture et ont accepté d’indemniser en partie, malgré la vétusté d’un vice allégué, dans les cas où le vendeur s’est rendu coupable d’un dol ou d’une fraude civile, notamment lorsque le vendeur avait connaissance de l’état vétuste et ne l’aurait pas divulgué avant la vente et a induit l’acheteur en erreur à cet égard.

b) Le vice doit être grave

Il y a deux niveaux de gravité reconnus. Le vice doit être suffisamment sérieux pour que si l’acheteur l’avait connu, il n’aurait pas acheté l’immeuble ou encore, s’il l’avait connu, il ne l’aurait acheté qu’à un moindre prix. En d’autres mots, les conséquences des vices ne doivent pas s’avérer insignifiantes. Ainsi, un vice pris isolément peut ne pas rencontrer le test de gravité requis. Par contre, un immeuble peut être affecté d’un ensemble de vices mineurs, qui mis ensemble, vont permettre de rencontrer la gravité exigée par la loi.

c) Le vice doit être inconnu de l’acheteur au moment de la vente

Il est essentiel que l’acheteur n’ait pas eu connaissance du vice avant la vente. Il appartiendra au vendeur de prouver qu’il avait dénoncé le vice lors de la vente à l’acheteur ou que l’acheteur en avait par ailleurs connaissance. Pour ce faire, il aura recours à la correspondance échangée avant la vente, incluant la promesse d’achat, les contre-offres ou documents de modifications, amendements, déclaration du vendeur, courriels et correspondances entre les différents intervenants (représentants des parties et/ou les parties personnellement). Notons que la dénonciation incomplète ou erronée du vice n’emporte pas connaissance du vice par l’acheteur.

d) Le vice doit être non apparent

Le vice ne doit pas avoir été apparent, notamment visible, au moment de la vente. Un vice apparent est celui qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert selon l’article 1726 du Code civil du Québec. Règle générale, il n’est donc pas nécessaire de recourir à un expert lors de l’examen préachat de la propriété. 

Le caractère non apparent du vice s’apprécie de façon objective, c’est dire que les tribunaux évaluent si un acheteur ordinaire aurait pu déceler le vice. Certains facteurs subjectifs peuvent cependant être pris en compte lors de l’évaluation du caractère caché du vice, par exemple, la confiance légitime que l’acheteur entretient à l’égard du vendeur ou la compétence technique de l’acheteur. Si l’acheteur est un professionnel dans le domaine technique, soit un entrepreneur en construction, architecte ou ingénieur en bâtiment, il est tenu de procéder à un examen plus approfondi. De plus, lorsque l’immeuble a une vocation commerciale ou industrielle, l’acheteur se doit de procéder à un examen plus poussé. Un faible prix ou une exclusion de garantie légale peuvent aussi être des facteurs qui obligent l’acheteur à être plus diligent. Toutefois, l’acheteur n’a pas à prendre des mesures exceptionnelles pour découvrir les vices, par exemple, ouvrir les murs ou creuser le sol, à moins d’un indice révélateur d’un vice. En effet, si l’acheteur constate des indices d’un problème probable, il doit pousser plus en profondeur son examen. 

Il a été reconnu par les tribunaux québécois que la présence d’un expert est nécessaire dans certains cas pour que l’acheteur soit jugé prudent et diligent. Il s’agit notamment du cas de la présence d’indices de vices potentiels, ce qui peut inclure l’âge très avancé d’un immeuble, le type d’immeuble acheté (vérification de contamination aux hydrocarbures dans le cadre de l’achat d’une station d’essence par exemple). Tout dépend d’une appréciation globale des circonstances et le caractère raisonnable ou non de l’examen fait par l’acheteur. 

Il a aussi été décidé que des représentations trompeuses ou déclarations erronées du vendeur pouvaient conduire les tribunaux à juger caché un vice qui aurait été autrement apparent. Il est important de mentionner que la compétence technique du vendeur pourra jouer dans la balance lorsque les tribunaux apprécieront la bonne foi du vendeur dans ses représentations envers l’acheteur.  À cet égard, il est pertinent de souligner qu’une présomption de connaissance du vice existe à l’encontre d’un vendeur professionnel.

e) Le vice doit être antérieur à la vente

Il revient à l’acheteur de prouver que le vice était antérieur à la vente. Le vice peut n’avoir existé qu’en germe, c’est-à-dire que les effets du vice peuvent se manifester après la vente pourvu que la cause soit antérieure à la vente. Cette condition permet d’éviter qu’un vendeur soit tenu responsable d’un mauvais usage par l’acheteur ou qu’un vendeur soit poursuivi alors que le vice résulterait d’une modification de l’immeuble par l’acheteur.

L’acheteur peut toutefois bénéficier d’une présomption de fait notamment s’il dénonce le vice tôt après la délivrance ou s’il prouve que le vice s’est manifesté peu après. Si le vendeur prétend plutôt que le vice est dû à un mauvais usage ou de modifications subséquentes à l’achat par l’acheteur, ce sera au vendeur de le démontrer.

Dans le cas d’un recours contre un vendeur professionnel, une présomption d’antériorité du vice existe en faveur de l’acheteur lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce.

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