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La protection d’une Fiducie contre d’éventuels jugements

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La fiducie étant un patrimoine distinct, les biens qu’elle détient ne sont ni dans le patrimoine du constituant, ni dans celui des bénéficiaires et ne peuvent généralement pas, être saisis par les créanciers.

Quelques exceptions à la règle sont prévues par des dispositions législatives et circonscrites par la jurisprudence. Il est prévu que le créancier, s’il en subit un préjudice, peut faire déclarer inopposable à son égard l’acte juridique que fait son débiteur en fraude de ses droits, notamment l’acte par lequel il se rend ou cherche à se rendre insolvable ou accorde, alors qu’il est insolvable, une préférence à un autre créancier. (1)

Le Code Civil prévoit également que, la créance doit être antérieure à l’acte juridique attaqué, sauf si cet acte avait pour but de frauder un créancier postérieur. (2) La créance doit être certaine au moment où l’action (3) est intentée; elle doit aussi être liquide et exigible au moment du jugement sur l’action, et l’action doit être intentée avant l’expiration d’un an à compter du jour où le créancier a eu connaissance de l’acte attaqué. (4)

La Cour supérieure a déjà autorisé un créancier à saisir tous les éléments d’actif connus de la fiducie, car le constituant de cette fiducie était, au moment des transactions, lourdement endetté et qu’il faisait de plus l’objet de poursuites judiciaires. La Cour a souligné le caractère frauduleux manifeste des transactions et le fait que le débiteur n’avait pas l’intention de faire face à ses obligations. (5)

Par ailleurs, dans une autre décision de la Cour d’appel, seulement certaines transactions ont été déclarées inopposables au créancier. Il a été conclu que le créancier n’avait pas réussi à démontrer, par prépondérance de preuve, que ces actes avaient été faits en fraude de ses droits, ni que le défendeur s’était placé dans un état d’insolvabilité ou qu’il avait cherché a le faire. La Cour a souligné qu’afin de déclarer l’inopposabilité, les transactions doivent compromettre toute chance du créancier d’être un jour payé.

La Cour a cependant ordonné aux fiduciaires de faire rapport au créancier de l’utilisation faite des biens des fiducies et d’aviser le créancier par écrit avant d’effectuer un versement au débiteur. Ainsi, les sommes reçues par le débiteur, en sa qualité de bénéficiaire des fiducies, sont saisissables par le créancier, mais seulement lorsqu’il les détient en main propre. (6)

Dans l’arrêt Levasseur c. 9095-9206 Québec inc. (7) le défendeur saisi s’oppose à la saisie-arrêt entre les mains d’une prétendue fiducie qu’il aurait lui-même constituée, alors que la partie saisissante invoque le caractère simulé de la fiducie, le défendeur s’étant nommé cofiduciaire avec un constituant complaisant. La Cour d’appel en vient à la conclusion que le défendeur conserve tous les droits sur le patrimoine d’affectation, de sorte que ce dernier n’aurait pas la caractéristique de véritable fiducie. Autrement dit, le patrimoine d’affectation ne serait pas distinct du patrimoine du défendeur personnellement. Le tribunal valide ainsi la saisie pratiquée comme si les biens n’étaient pas sortis du patrimoine du défendeur.

Le caractère simulé d’une fiducie est d’autant plus présent quand aucune contrepartie n’est offerte lors du transfert des biens à la fiducie.

Concernant la gestion de la fiducie, elle doit être gérée de façon indépendante par les fiduciaires, donc les droits de véto, les votes multiples et les clauses prévoyant un pouvoir discrétionnaire au constituant de destituer les autres fiduciaires sont à proscrire, car cela pourrait permet au créancier d’intenter un recours en inopposabilité basée sur la théorie du simulacre créer par la fiducie.

Dans votre situation, malgré que la protection offerte par la Fiducie soit imparfaite, vos créanciers pourront toujours tenter d’attaquer les gestes que vous avez posés si ces derniers vous ont rendu insolvable, cependant, vos créanciers auront le lourd fardeau (cout financier élevé, longue procédure et preuve complexe) de démontrer, que les actes qu’ils voudront rendre inopposables à leur égard, ont été faits en fraude de leurs droits et que ces actes vous ont placé dans un état d’insolvabilité.

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[1] Article 1631 C.c.Q.

[2] Article 1634 C.c.Q.

[3] Article 1634 C.c.Q.

[4] Article 1635 C.c.Q.

[5] Empire, compagnie d’assurancevie c. Thibault, 2011 QCCS 3556

[6] Levasseur c. 9095-9206 Québec inc., 2012 QCCA 45

[7] Levasseur c. 9095-9206 Québec inc., 2012 QCCA 45

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