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La procédure en irrecevabilité (165 (4) C.p.c.)

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La procédure en irrecevabilité/absence de droit (165 (4) C.p.c.)

Une fin de non-recevoir peut être présentée à tout moment, même une fois la défense produite. Dans ce dernier cas toutefois, les dépens accordés seront les mêmes que ceux accordés si la requête est faite dans les délais.[1]

La fin de non-recevoir préliminaire : Une requête en irrecevabilité peut tout aussi bien être présentée à l’encontre de la requête introductive d’instance qu’à l’encontre d’une procédure interlocutoire ou d’une requête en suspension des procédures. Dans tous les cas, la question de droit qui se pose consiste à savoir si l’ensemble des faits allégués dans la requête et tenus pour avérés pouvait juridiquement donner naissance au remède recherché. À moins de circonstances particulières, le juge a l’obligation de statuer sur la requête.

La possibilité du cumul des requêtes en rejet et en irrecevabilité : Une même procédure peut cumuler des conclusions visant tout à la fois l’irrecevabilité de la requête parce que non fondée et des conclusions en rejet parce que manifestement mal fondée, frivole, dilatoire ou abusive, fondée sur les articles 54.1 et suivants du Code de procédure civile.

Dans les cas où une requête en irrecevabilité est présentée de manière concomitante à une requête en rejet, le tribunal doit d’abord considérer les moyens d’irrecevabilité avant de statuer sur le rejet.

Dans le cas où le requérant choisit de cumuler une requête en irrecevabilité et une requête en rejet, il ne faut pas perdre de vue que la requête sous 165 (4) C.p.c. doit tenir les faits allégués dans la requête pour avérés peu importe l’information qui aurait pu être recueillie lors d’un interrogatoire.

La possibilité de redresser le grief : La requête en irrecevabilité doit être analysée en tenant compte de la procédure telle que rédigée et ce, peu importe qu’un amendement puisse éventuellement avoir pour effet de remédier à ses lacunes138. En principe l’article 166 C.p.c. permet de redresser le grief sur lequel l’irrecevabilité est fondée lorsqu’il ne s’agit que de corriger une irrégularité de pure procédure qui ne cause pas réellement préjudice à la partie qui l’invoque et n’est pas un motif de rejet de la demande, mais non lorsque le grief est fondé sur le défaut de capacité du poursuivant.

La possibilité d’amender : À l’encontre d’une requête en irrecevabilité, il est toujours possible de contester la requête et d’amender la procédure autrement « irrecevable », pour, par exemple, alléguer une interruption de prescription lorsque l’irrecevabilité se fonde sur la prescription. Le droit à l’amendement est la règle (article 199 C.p.c.).

Les faits doivent être tenus pour avérés : Contrairement aux autres moyens d’irrecevabilité énoncés aux paragraphes 1 à 3 de l’article 165, dans le cas de la requête fondée sur le paragraphe 4, les faits doivent être tenus pour avérés. Cela implique que le juge saisi de la requête doit trancher à la lueur des seuls allégués produits, tels que rédigés et des pièces produites à leur soutien. Cela étant, le tribunal ne doit tenir pour avérés que les faits que le requérant entend prouver et les pièces produites à leur soutien; il ne peut prendre pour acquis la qualification juridique que le requérant en fait, laquelle est purement subjective. Le tribunal ne pourra non plus prendre en considération une trame factuelle écrite dans un affidavit au soutien de procédures, les faits allégués dans une intervention ou un rapport d’expertise. Il doit s’en tenir à établir si, telles que rédigées, les prétentions des parties peuvent donner lieu aux conclusions recherchées, en supposant qu’elles soient vraies.

Par exemple dans le cas d’un recours intenté à l’encontre d’une municipalité, le défaut d’alléguer la mauvaise foi, un abus de pouvoir et une violation de règles de justice naturelle rend le recours irrecevable à sa face même. Ainsi en est-il aussi du défaut d’alléguer la faute dans un recours en responsabilité extracontractuelle, d’une clause de renonciation à poursuivre qui répondrait à certaines conditions lorsque le droit réclamé repose sur une simple erreur cléricale.

L’obligation pour le juge de statuer sur la requête en irrecevabilité : Lors de la présentation d’une requête en irrecevabilité, une question de droit est posée au tribunal, lequel a l’obligation de statuer. Par exemple, dans le cas d’une requête en irrecevabilité présentée au motif que l’action est non fondée en droit, le tribunal doit s’interroger sur la question de savoir si l’ensemble des faits allégués dans la requête et tenus pour avérés pouvait juridiquement donner naissance au remède recherché. Le juge saisi d’une requête en irrecevabilité portant sur un point de droit précis doit trancher quelles que puissent être soit la difficulté, soit la complexité de la question.

L’effet du jugement accueillant la requête en irrecevabilité : Le jugement prononçant l’irrecevabilité du recours n’aura force de chose jugée qu’à l’égard de la procédure telle que libellée. Par conséquent, à moins d’éléments de faits supplémentaires, la demande rejetée parce que prescrite sera finale et aura un effet déclaratif quant à l’extinction du droit qui en fait l’objet.

Lorsqu’une action est rejetée parce qu’elle est irrecevable en droit, le demandeur peut se reprendre si son droit d’action n’est pas prescrit ; de la même façon, lorsqu’un plaidoyer est rejeté parce qu’irrecevable en droit, c’est le plaidoyer comme tel qui serait rejeté et ce ne sont pas tous les moyens de défense qui le seraient. Par ailleurs, la demande rejetée parce que non fondée en droit pourra être réintroduite à la condition qu’il soit remédié au vice juridique qui l’affectait dans sa version initiale.

L’effet déclaratif du jugement déclarant un droit prescrit : Le débiteur qui choisit de faire intervenir le jeu de la prescription en sa faveur afin d’être libéré ou de provoquer l’extinction de la créance doit l’invoquer dans le cadre d’une instance. La prescription n’opère pas de plein droit. Elle doit être opposée par le débiteur, qui n’est libéré qu’autant qu’il juge bon de se servir de ce moyen de défense à la condition que par ses actes on ne puisse inférer qu’il ait renoncé à s’en prévaloir. De deux choses l’une : l’effet d’un jugement quant au sort de la prescription pourra en déclarer les effets accomplis soit, de façon préliminaire, en déclarant l’irrecevabilité de l’action en justice ou encore en rejetant l’action prescrite, après audition au mérite au motif qu’on ne peut plus en demander la sanction en justice et ce, même si l’existence du droit était certaine.

Le principe est à l’effet que celui qui forme une demande en justice doit alléguer les faits au soutien de ses prétentions. Cependant, la recevabilité de la demande en justice est subordonnée à l’existence, chez son auteur, du droit d’agir relativement à la prétention considérée et l’inexistence d’un tel droit est sanctionnée par une fin de non-recevoir. Le droit dont il est question ici correspond à l’action en justice ; une fois la prescription échue, l’action est éteinte et par conséquent, irrecevable. Il semble donc juste d’affirmer que son effet exact est de priver le créancier de son action en justice contre le débiteur.

L’appel d’un jugement statuant sur une requête en irrecevabilité : En principe, le jugement rejetant une requête en irrecevabilité n’est pas susceptible d’appel puisqu’il n’a pas l’autorité de la chose jugée et que le jugement au fond pourra y remédier. Il existe toutefois quelques exceptions à ce principe :

  1. Lorsque le débat porte sur la compétence du tribunal,
  2. lorsque l’irrecevabilité est invoquée pour cause de litispendance ou de chose jugée,
  3. lorsque la question de droit soulevée est nouvelle,
  4. lorsqu’il s’agit d’une question de droit nouvelle et d’intérêt public qu’il est nécessaire, dans l’intérêt de la justice, de trancher immédiatement.

Dans le cas d’un jugement accueillant la requête en irrecevabilité, ce sont les règles générales de l’appel d’un jugement définitif qui s’appliqueront.[2]

[1] Code de procédure civile du Québec, Art. 167

[2] http://edoctrine.caij.qc.ca/wilson-et-lafleur-livres/9/1343432569

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***Mise en garde le moyen d’irrecevabilité prévu à l’art. 165(4) C.p.c. a été remplacé par l’article 168, al. 2 dans le nouveau Code de procédure civile. Voir notre texte sur l’article 168 du nouveau Code de procédure civile: https://lacombeavocats.ca/1232-2/

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